La protection du climat est-elle possible sans plastique ?

La protection du climat est-elle possible sans plastique ?

| Auteur: Patrick Semadeni

Sur son site Internet, Greenpeace a publié un article au sujet du rapport « Plastic & Climate », paru en mai 2019, sous le titre « Klimakiller Kunstoff » (Plastique exterminateur de climat). En 2019, de la production au traitement des déchets, un total de 850 millions de tonnes de CO2 aurait été libéré dans l’atmosphère1. Cependant, à l’échelle mondiale, les émissions de gaz à effet de serre s’élevaient à 53,5 gigatonnes en équivalent2 CO2, selon le GIEC. Peut-on parler d’exterminateur du climat alors qu’il est question d’une part de 1,6 % ? La protection du climat est-elle seulement possible sans le plastique ?

 

Abandonner le plastique complique la réalisation des objectifs climatiques

Selon leurs calculs, cette étude porte donc sur 1,6 % des émissions de gaz à effet de serre. Sa démarche est donc absolument contestable.

Cette étude affirme avoir calculé les émissions de CO2 du cycle de vie complet des plastiques. Les phases suivantes sont incluses dans le cycle de vie1 :

  • L’extraction et le transport des combustibles fossiles
  • Le raffinage et la fabrication du plastique
  • La gestion des déchets plastiques
  • L’impact continu sur les voies fluviales, les océans et le paysage

La phase d’utilisation n’est pas prise en compte. Et c’est justement à ce stade que les plastiques jouent un rôle décisif pour la protection du climat :

  • Mobilité : grâce aux plastiques, les véhicules, les bateaux, les chemins de fer et les avions sont beaucoup plus légers et nécessitent moins d’énergie
  • Chauffage : la conductivité thermique des plastiques est très faible, ce qui en fait le meilleur matériau pour l’isolation des bâtiments
  • Gaspillage alimentaire : les emballages adéquats en plastique permettent de limiter fortement le gaspillage alimentaire, ce qui a pour conséquence que moins de nouveaux aliments doivent être produits
  • Recyclage : étant donné que le point de fusion du plastique est moins élevé que celui d’autres matériaux, recycler le plastique requiert moins d’énergie

Abandonner le plastique rendrait impossible la réalisation des objectifs climatiques de l’Accord de Paris. Les émissions de gaz à effet de serre tripleraient !3

Les coûts environnementaux passeraient de 139 milliards à 533 milliards de dollars américains.4

 

Comment le plastique aide à réaliser les objectifs climatiques de l’Accord de Paris

Mobilité

Les plastiques ont un poids spécifique (densité) d’environ 1 g/cm3. Les autres matériaux qui sont intégrés aux véhicules, aux avions et aux bateaux sont bien plus lourds5 :

  • Aluminium : 2,7 g/cm3
  • Verre : 2,5 g/cm3
  • Acier : 7,85 g/cm3

Swiss Plastics estime la réduction du poids d’une voiture de classe moyenne à 300 kg grâce à l’utilisation de plastique.6

En outre, de nouveaux matériaux, tels que les composites de plastique, offrent de nouvelles possibilités de construction légère. Les autorités américaines des autoroutes ont demandé à l’université George Washington de calculer quelle réduction de poids peut être obtenue en utilisant le plus possible des plastiques modernes et des matériaux composites pour construire un pick-up. Le résultat est impressionnant : le poids d’une Chevrolet Silverado peut passer de 2 307 tonnes à 1 874 tonnes. Cela équivaut à 19 % supplémentaires !7

Sans l’utilisation des plastiques, le secteur de la mobilité multiplierait ses émissions de CO2.

 

Isolation des bâtiments

Des mousses en polyuréthane (PUR) sont utilisées pour isoler les bâtiments. Celles-ci affichent une conductivité thermique de 0,021 W/mK.8 En comparaison, la conductivité thermique d’autres matériaux est de9 :

  • Panneau isolant en fibres de bois : 0,037..0,06 W/mK
  • Laine : 0,035 W/mK
  • Liège : 0,035..0,046 W/mK
  • Granulat de mousse de verre : 0,08 W/mK
  • Béton : 2,1 W/mK

À l’échelle mondiale, le chauffage et l’électricité génèrent 25 % des émissions de gaz à effet de serre10.

L’isolation conséquente des bâtiments à l’aide de mousses PUR permet de diminuer les émissions de CO2. En renonçant à celles-ci, les émissions augmenteraient considérablement parce que les matériaux alternatifs isolent moins bien !

 

Gaspillage alimentaire

Environ 1/3 des aliments produits dans le monde sont gaspillés. En poids, cela équivaut à 1,3 milliard de tonnes !11

Les emballages en plastique adéquats peuvent aider à limiter considérablement ce gaspillage alimentaire. La diminution du gaspillage alimentaire permet d’émettre 270 g de CO2 en moins par kilo d’aliments frais. L’empreinte carbone des emballages ne représente que 1,3 %.12

Renoncer au plastique pour emballer les aliments aurait des conséquences désastreuses sur l’empreinte carbone : une quantité bien plus importante d’aliments devrait être produite, ce qui engendrerait des coûts environnementaux colossaux !

 

Le recyclage est la solution

Dans le cadre de sa stratégie sur les matières plastiques, la Commission européenne s’est clairement exprimée en faveur de l’économie circulaire. Elle a pour objectif d’utiliser 10 millions de tonnes de produits recyclés en Europe d’ici l’année 2025.13

Cette étude souligne également la contribution positive du recyclage des plastiques en matière de lutte contre le changement climatique : chaque tonne métrique de plastique recyclé permet de diminuer les émissions de CO2 de 1 395 tonnes :


(veuillez cliquer pour agrandir)

Si environ 70 % des plastiques pouvaient être recyclés, la neutralité climatique serait assurée. Si l’on tient compte de la diminution des émissions de CO2 pendant la phase d’utilisation, cette valeur pourrait même être plus basse.

Toute la chaîne de valeur est tenue d’une part de concevoir des produits faciles à recycler (Design for Recycling), et d’autre part d’accepter et d’acheter des produits à base de matériaux recyclés.

En outre, il faut renoncer aux emballages inutiles, la part des plastiques utilisés doit être réduite au poids nécessaire pour protéger le produit emballé ou pour remplir sa fonction.

Une utilisation raisonnable du plastique, alliée à un taux de recyclage élevé, est la condition préalable nécessaire pour réaliser les objectifs climatiques de la Convention de Paris.

Abandonner les plastiques a des répercussions néfastes sur les émissions de gaz à effet de serre et accélère le réchauffement climatique.

 

Sources:

1 Plastic & Climate, The hidden cost of a plastic planet, CIEL, Washington, 2019

2 UNEP, Emissions Gap Report 2018, Katowice

3 Prof. David Bucknall, Institute of Chemical Sciences, Herion-Watt University, zitiert in EuPC Conference, Berlin, 2019

4 Plastics and Sustainability : a valuation of environmental benefits, costs and opportunities for continuous improvement. American Chemistry Council / Trucost, New York, 2016

5 Wikipedia, 2019

6 Swiss Plastics, Aarau, 2018

7 Investigation of Opportunities for Leightweight Vehicels Using Advanced Plastics and Composites, US Dept. Of Transportation, NHTSA, Washington, 2012

8 Saechtling Kunststoff Taschenbuch Bauer et al., Hanser München, 2007

9 Wikipedia, 2019

10 IPCC, Climate Change 2014, Cambrige University Press, New York, 2014

11 Global Food Losses and Food Waste, FAO UN, Rom, 2011

12 How Packaging Contributes to Food Waste Prevention, Denkstatt, Wien, 2017

13 Eine europäische Strategie für Kunststoffe in der Kreislaufwirtschaft. Europäische Kommission, Brüssel, 16. Januar 2018

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